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Page:Leblanc - L’Agence Barnett et Cie, 1933.djvu/95

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L’HOMME AUX DENTS D’OR

vous étourdissant par quelques pirouettes. Comprenez-vous maintenant ? Et dois-je vous rappeler qu’une glace qui réfléchit un objet vous présente la droite de cet objet à gauche et la gauche à droite. D’où il advint que vous vîtes à gauche les dents d’or qui étaient à droite.

— Oui, s’écria victorieusement l’inspecteur Béchoux. Mais il n’empêche que si j’avais raison, M. le curé n’avait pas tort en affirmant qu’il avait vu des dents en or. Il est donc nécessaire qu’à la place de M. Vernisson vous nous présentiez un individu qui ait des dents en or.

— Pas la peine.

— Pourtant le voleur avait des dents en or !

— Est-ce que j’en ai, moi ? » dit Barnett.

Il retira de sa bouche une feuille de papier doré qui gardait la forme de ses deux dents.

« Tenez, voici la preuve. Elle est convaincante, n’est-ce pas ? Avec des empreintes de chaussures, un chapeau gris, un pardessus marron et deux dents en or, on vous fabrique un indiscutable M. Vernisson. Et combien c’est facile ! Il suffit de se procurer un peu de papier doré… comme celui-ci, qui provient de la même boutique de Vaneuil où le baron de Gravières a acheté une feuille de papier doré, voici trois mois. »

La phrase, jetée négligemment, se prolongea dans un silence surpris. À la vérité, Béchoux, que l’argumentation de Barnett avait conduit pas à pas vers le but, ne fut pas autrement étonné. Mais le curé demeurait suffoqué. Il observait à la dérobée son honorable paroissien, le baron de Gravières. Celui-ci, très rouge, ne soufflait mot.

Barnett rendit le chapeau et le pardessus à M. Vernisson, qui se retira en marmottant :