Aller au contenu

Page:Leblanc - L’Image de la femme nue, 1934.djvu/116

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XVII

Flavie.

Flavie dormait.

Elle s’était endormie en lisant, à la lueur d’une haute lampe posée sur la table de nuit et qui éclairait toute la chambre, — une chambre vaste, très simplement meublée de quelques chaises, d’un secrétaire en acajou et d’un guéridon, aérée de deux fenêtres aux persiennes closes, et dont le lit adossé au panneau de gauche se trouvait dans la partie la plus éloignée de la porte.

Stéphane referma avec précaution, fit quelques pas, et regarda longtemps la jeune femme. À cause de la chaleur elle n’avait remonté le drap que jusqu’à sa taille, mais sa chemise de toile, si fine qu’elle fût, ne laissait rien deviner de son buste ni de ses bras. Le visage gardait un ait de grand apaisement. Sa coiffure, dérangée, montrait en désordre des boucles fauves.

Le parquet craqua sous le tapis. Dans ce premier sommeil, moins profond, elle dut avoir la sensation d’une présence. Ses paupières battirent. Elle ouvrit les yeux, s’effraya de cette vision, puis, comprenant, se dressa, la face tendue, les bras raidis, et balbutia :

— Allez-vous-en !… C’est une honte !… Allez-vous-en !

Stéphane hocha la tête. Il vacillait sur ses jambes. Mais il était résolu.

— J’ai à vous parler, dit-il.

Elle répéta avec égarement :

— Allez-vous-en !… Si vous faites un pas…

L’idée d’être au lit, si près de cet homme, devait lui paraître intolérable, car elle attrapa, sur une chaise, un peignoir de mousseline, s’en enveloppa et fut debout, d’un mouvement rapide. La figure était farouche. Il la sentit implacable, toute concentrée en elle-même pour opposer une résistance forcenée, s’il osait mettre la main sur elle.

Pour l’instant, Stéphane n’avait d’autre intention que de l’adoucir, de s’expliquer et d’étouffer sa propre émotion. Jamais aucune circonstance de sa vie ne lui avait paru plus solennelle. L’idée de la mort palpitait en lui.

— Vous n’avez rien à redouter, Flavie. Mais il faut que vous sachiez que je vous aime… Il faut m’écouter… C’est votre départ qui me rend