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Page:Leblanc - L’Image de la femme nue, 1934.djvu/137

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l’image de la femme nue

— Pourquoi ? Pourquoi ce rendez-vous à l’Arche-d’Ormet ?

— Pour le voir et lui donner des indications sur la statue.

— Vous ne saviez pourtant pas qu’elle était ici ?

Irène prononça, l’accent mauvais, haineux :

— Non. Mais je lui ai dit qu’il pourrait retrouver le même modèle, la même perfection. Une femme existait, aussi belle… Elle vivait à Madrid, dans une communauté libre, sous le nom religieux de Sœur Adélaïde. Il y alla.

— Votre but ? souffla Stéphane qui, courbé, se tenait la tête entre les mains.

— Mon but ? J’étais persuadée qu’il l’aimerait et se ferait aimer d’elle.

— Oui, balbutia-t-il, vous espériez que Flavie serait sa maîtresse !

— Oui…

— Et elle a été sa maîtresse ?

— Non. Ayant découvert Sœur Adélaïde, il la suivit chaque jour, durant des semaines, sans oser l’approcher. La même passion qu’autrefois le reprenait. Mais Flavie quitta le couvent. Rentré à Paris, votre père lui adressa en Espagne, sous le nom de Sœur Adélaïde, des lettres qui furent renvoyées au château, que Zoris intercepta, et qui le décidèrent à venir à Paris, à voir Guillaume Bréhange, et à lui révéler…

— À lui révéler… quoi ?

— Que la femme qu’il aimait autant que la première et qui lui rendait son inspiration d’artiste, que cette femme était sa fille…

Les mots se prolongèrent dans le silence. Stéphane n’eut pas un gémissement.

Au bout d’un instant, il se redressa, très pâle et prononça :

— Sur quoi mon père se suicide et, quelques mois plus tard, quand je fais la même enquête que lui dans la région d’Arles, vous recommencez votre petite entreprise pour atteindre le même but ?

Elle eut l’audace de lui répondre :

— Oui.

— L’homme qui m’a suivi dans les rues, Rosario sans doute, c’est vous qui l’aviez envoyé ?

— Non. Je suppose que c’est Zoris.

— Mais c’est vous qui m’avez attiré à l’Arche-d’Ormet ?

— Oui.

— Et le piège que vous m’avez tendu, c’est d’y faire venir Véronique ?

— Oui !… oui !…