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Il y a dans la réunion de la beauté parfaite et de la suprême élégance un prestige qui émeut les foules. Entre l’admirable Régine Aubry et le luxe raffiné de sa toilette existait une harmonie dont on recevait l’impression avant d’en saisir la cause. Mais surtout l’éclat des joyaux fixait les regards. Au-dessus de la jupe, une tunique lamée d’argent était serrée à la taille par une ceinture de pierreries et emprisonnait la poitrine dans un corselet qui semblait fait uniquement de diamants. Ils éblouissaient. Ils entrecroisaient leurs scintillements jusqu’à ne former autour du buste qu’une flamme légère, multicolore et frissonnante.

— Crebleu, dit Van Houben, c’est encore plus beau que je ne croyais, ces sacrés cailloux ! Et ce qu’elle les porte bien, la mâtine ! En a-t-elle de la race ? Une impératrice !

Il modula un petit ricanement.

— D’Enneris, je vais vous confier un secret. Savez-vous pourquoi j’ai paré Régine de tous ces cailloux ? Eh bien, d’abord pour lui en faire cadeau le jour où elle m’accorderait sa main… sa main gauche, bien entendu (il pouffa de rire) et ensuite parce que cela me permet de la gratifier d’une garde d’honneur qui me renseigne un peu sur ses faits et gestes. Ce n’est pas que je redoute les amoureux… mais je suis de ceux qui ouvrent l’œil… et le bon !

Il tapotait l’épaule de son compagnon en ayant l’air de lui dire : « Toi, mon petit, ne t’y frotte pas. »

D’Enneris le rassura.

— De mon côté, Van Houben, vous pouvez être tranquille. Je ne fais jamais la cour aux femmes ou aux amies de mes amis.

Van Houben fit la grimace. Jean d’Enneris lui avait parlé, comme à l’ordinaire, sur un petit ton de persiflage qui pouvait prendre dans l’occurrence une signification assez injurieuse. Il résolut d’en avoir le cœur net et se pencha sur d’Enneris.

— Reste à savoir si vous me comptez comme un de vos amis ?

D’Enneris, à son tour, lui saisit le bras.

— Taisez-vous…

— Hein ? Quoi ? Vous avez une façon…

— Taisez-vous.

— Qu’y a-t-il ?

— Quelque chose d’anormal.

— Par où ?