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LA MACHINE À COURAGE

notre nourriture, supprimer nos moindres frais et attendre de jour en jour. Les cinq cents dollars n’arrivaient pas. Quand Véral reparut enfin, il était satisfait, comme d’habitude, mais n’apportait rien.

« — Le journal refuse de continuer ses avances. Je n’ai rien à vous remettre. »

C’était si simple dans sa voix et si inconcevable dans ma pensée que je ne comprenais pas. Il répéta, martelant ses syllabes :

« — Le journal refuse de continuer ses avances. »

« — Mais j’ai un contrat, Hearst n’a qu’à publier et me payer ! »

« — Si nous étions libres, ce serait fait depuis longtemps, mais puisque vous n’admettez pas le point de vue du journal c’est impossible. Ça peut traîner indéfiniment, des années… »

« — Quoi ? Comment ? »

« — Oui, on peut renoncer à vous publier si vous ne cédez pas. Alors vous n’aurez plus qu’à rembourser le journal pour libérer votre manuscrit. »

Autour de ma gorge un cercle se rétrécissait. Hearst avait acheté mon manuscrit pour quatre mille dollars payables après la publication, mais son contrat ne fixait aucun délai pour cette publication. Un autre contrat pour ces concerts ou du cinéma me permettrait de rembourser le Sunday American. J’étais engagée par Véral pour cinq années… Mais qu’y avait-il de vrai dans tout ce qu’il prétendait préparer ? Que pouvait-il faire, étant insolvable et connu comme tel. Dans l’immeuble qu’il habitait, on l’avait affirmé à Monique… Maintenant je comprenais toutes leurs comédies et pourquoi ils voulaient ma réclusion…

Mon manager ne s’emballait pas, il supplia.

« — Vous refusez une fortune ! On ne refuse pas une fortune ! »

Si l’affaire était perdue, il perdait sa part.


Read et Véral vinrent protester ensemble. Ce qu’ils appelaient le « sensationnel indispensable à l’appétit du lecteur