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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

À la lueur du réverbère, elle reconnut Beaufrelant et le Hourteulx.

Couverts de boue, les habits en désordre, sans chapeau, ils combattaient avec une sorte de rage furieuse, avec l’acharnement d’ennemis mortels dont la haine se réjouit d’une occasion de vengeance longtemps différée. Ils frappaient à tour de bras, se colletaient de nouveau, se bourraient la figure de coups de poing, pour s’étreindre ensuite plus violemment encore. Et c’étaient des injures, des exclamations victorieuses : « Tiens, bandit, attrape… à toi celui-ci… Eh bien, mon gaillard, l’as-tu reçu ? Aïe donc, ça y est-il, cette fois-là ? »

Et ils prenaient Gilberte à témoin, comme une reine de tournoi en l’honneur de qui deux de ses chevaliers brisent une lance.

« Qu’en dites-vous, madame, de ce coup droit ?… Et de cette riposte, madame ?… Ah ! il vous guettait, le forban !… Ah ! gredin, tu rôdais autour de sa maison !… »

Renonçant à intervenir, elle voulut s’éloigner. Ils se relevèrent et la suivirent, tout en se bousculant, chacun cherchant à se débarrasser de son rival. Mais l’ardeur de la lutte les fit retomber. Elle se sauva.

La première rue où ses pas la conduisirent débouchait en vue de l’église. La maison des la Vaudraye était proche, elle y courut.

Au coup de sonnette, personne ne répondit. Pourtant il y avait de la lumière au salon. Elle frappa à l’une des croisées. Quelqu’un vint ouvrir, Guillaume de la Vaudraye. Il s’écria :