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LE ROMAN D’UNE JEUNE FILLE

été mariée, que c’est là un titre que j’ai pris dans l’espoir de détourner l’attention, et que Mme Armand n’a jamais existé. »

Guillaume tremblait d’émotion. Il comprenait et ne voulait pas admettre la vérité, tellement l’erreur lui eût été douloureuse.

« Non, non, je n’ose pas croire… vous, jeune fille !…

— Qu’y a-t-il donc de si extraordinaire ?

— Ah ! Gilberte… »

Il lui avait saisi les mains, et il la contemplait avec un regard d’extase, Elle murmura :

« J’étais bien sûre que vous auriez une grande joie.

— C’est autre chose que de la joie. Il me semble que vous êtes encore plus belle et encore plus pure. Je ne Vous aime pas davantage, mais je vous aime d’une autre façon. »

Et il reprenait :

« Est-ce possible ! il n’y a personne dans votre passé ? mon bonheur n’a pas même cette ombre ?

— Tout mon passé, c’est vous, Guillaume. »

Mme de la Vaudraye s’approcha.

Ils n’avaient plus songé à elle, et son intervention leur causa une impression d’autant plus pénible que la gravité subite de sa figure faisait contraste avec : leur ravissement. Elle dit à Gilberte :

« Si Mme Armand n’existe pas, qui donc mon fils épouse-t-il ?

— Eh bien… Gilberte…

— Gilberte qui ?

— Gilberte moi, répondit la jeune fille s’efforçant de plaisanter, mais au fond vaguement inquiète.