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Page:Leblanc - La Vie extravagante de Balthazar, paru dans Le Journal, 1924-1925.djvu/14

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» Le comte nous donna les indications nécessaires, telles que l’inscription des trois lettres M. T. P. sur la poitrine du sieur Balthazar, et que l’empreinte de son pouce gauche. En outre, il nous montra, dans une armoire secrète, un portefeuille où se trouvaient seize cent mille francs en billets et titres au porteur. Il devait enfin nous fournir d’autres renseignements sur la mère de l’enfant, sur la personne à qui l’on avait confié celui-ci, et sur l’endroit où il vivait actuellement. Par malheur…

— Par malheur ?

— Le drame terrifiant que vous avez lu dans les journaux mit fin aux jours de notre client, et cela avant que nous l’eussions revu.

Balthazar qui ne connaissait rien de ce drame terrifiant, mais qui ne voulait pas l’avouer, chuchota :

— Oui… oui… j’ai lu… je me rappelle… Le mois dernier, n’est-ce pas ?

— Mais non, monsieur, rectifia vivement Me La Bordette, cela remonte plus haut. Le 10 septembre exactement, donc il y a sept mois, le comte Théodore qui chassait dans ses terres de Seine-et-Oise fut assassiné.

— Assassiné ! répéta Balthazar.

— Oui, monsieur, et vous vous souvenez de quelle horrible manière ! la hache qui frappa la victime avec une violence inouïe lui détacha presque entièrement la tête.

Une seconde fois la serviette de Coloquinte glissa de ses genoux. Le cou de Balthazar s’allongea au-dessus de son faux col. Il était blême.

— Je le savais… je le savais… un homme sans tête… la somnambule…

— La somnambule ?

— Oui… oui… j’ai consulté… balbutia le professeur en mots étouffés que Me La Bordette ne saisit pas… Tu te rappelles, Coloquinte… hier… ce qu’on m’a prédit ?…

Me La Bordette et ses deux conseillers furent d’avis qu’il fallait passer outre à cet accès de trouble bien excusable, et le discours des trois notaires s’acheva rapidement.

— Les suites de cette affaire, qui fit tant de bruit, vous les connaissez, et il serait oiseux de s’y attarder. Vous n’ignorez pas non plus qu’après des mois d’investigations, nous avons eu l’heureuse idée de recourir à l’agence X. Y. Z. Il ne nous reste donc qu’à préparer les voies et moyens qui vous permettront de porter l’affaire devant le Conseil d’État, de revendiquer votre droit au nom de Coucy-Vendôme, et de réclamer votre part d’héritage.