Page:Leblanc - La demoiselle aux yeux verts, paru dans Le Journal, du 8 déc 1926 au 18 jan 1927.djvu/186

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vait la jeune fille, qui demeurait immobile et muette dans sa posture rigide. Les mots ne paraissaient pas l’atteindre. Plutôt que ces mots, on eût dit qu’elle écoutait les bruits du dehors. Est-ce qu’elle espérait encore une impossible intervention ?

— Et alors ? fit Brégeac.

— Alors, répliqua le commissaire, grâce à lui, elle réussit une fois de plus à s’échapper. Et je vous avoue que j’en ris aujourd’hui, puisque…

Il baissa le ton.

— Puisque j’ai ma revanche… et quelle revanche, Brégeac ! Hein, vous rappelez-vous ?… il y a six mois ?… on m’a chassé comme un valet… avec un coup de pied, pourrait-on dire… Et puis… et puis… je la tiens, la petite… Et c’est fini.

Il tourna le poing comme pour fermer à clef une serrure, et le geste était si précis, indiquait si nettement son effroyable volonté à l’égard d’Aurélie que Brégeac s’écria :

— Non, non, ce n’est pas vrai, Marescal ?… N’est-ce pas ? vous n’allez pas livrer cette enfant ?…

— Là-bas, à Sainte-Marie, dit Marescal durement, je lui ai offert la paix, elle m’a repoussé… tant pis pour elle ! Aujourd’hui, c’est trop tard.

Et, comme Brégeac s’approchait et lui tendait les mains d’un air de supplication, il coupa court aux prières.

— Inutile ! tant pis pour elle ! tant pis pour vous !… Elle n’a pas voulu de moi… elle n’aura personne. Et c’est justice. Payer sa dette pour les crimes commis, c’est me la payer à moi, pour le mal qu’elle m’a fait. Il faut qu’elle soit châtiée, et je me venge en la châtiant. Tant pis pour elle !