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Page:Leblanc - Le Bouchon de cristal, paru dans Le Journal, 25-09 au 09-11-1912.djvu/178

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là, cela ne pouvait-il se voir à un signe matériel quelconque ? L’enlèvement de cet objet, contenu sans aucun doute dans un autre objet, avait-il laissé une trace, un vide ?

La constatation était aisée. Il s’agissait tout simplement d’examiner la table, puisque Lupin savait, par les plaisanteries de Sébastiani, que c’était là l’endroit de la cachette. Et cette cachette ne pouvait être compliquée, puisque Daubrecq n’était pas resté dans son bureau plus de vingt secondes, le temps, pour ainsi dire, d’entrer et de sortir.

Lupin regarda. Et ce fut immédiat. Sa mémoire avait enregistré si fidèlement l’image de la table avec la totalité des objets posés sur elle, que l’absence de l’un d’entre eux le frappa instantanément, comme si cet objet, et celui-là seul, eût été le signe caractéristique qui distinguât cette table de toutes les autres tables.

— Oh ! pensa-t-il avec un tremblement de joie, tout concorde… tout… jusqu’à ce commencement de mot que la torture arrachait à Daubrecq dans la tour de Mortepierre ! L’énigme est déchiffrée. Cette fois, il n’y a plus d’hésitation possible, plus de tâtonnements. Nous touchons au but. 

Et, sans répondre aux interrogations de l’inspecteur, il songeait à la simplicité de la cachette, et il se rappelait la merveilleuse histoire d’Edgar Poe où la lettre volée, et recherchée si avidement, est, en quelque sorte, offerte aux yeux de tous. On ne soupçonne pas ce qui ne semble point se dissimuler.

— Allons, se dit Lupin en sortant, très surexcité par sa découverte, il est écrit que, dans cette sacrée aventure, je me heurterai jusqu’à la fin aux pires déceptions. Tout ce que je bâtis s’écroule aussitôt. Toute conquête s’achève en désastre.