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— Pour sa conduite. On avait découvert qu’il s’échappait la nuit, et aussi, que durant des semaines, alors que soi-disant, il était auprès de nous, en réalité il disparaissait.

— Que faisait-il ?

— Il s’amusait, jouait aux courses, traînait dans les cafés et dans les bals publics.

— Il avait donc de l’argent ?

— Oui.

— Qui lui en donnait ?

— Son mauvais génie, l’homme qui, en cachette de ses parents, le faisait sortir du collège, l’homme qui le dévoya, qui le corrompit, qui nous l’arracha, qui lui apprit le mensonge, la débauche, le vol.

— Daubrecq ?

— Daubrecq.

Clarisse Mergy dissimulait entre ses mains jointes la rougeur de son front. Elle reprit de sa voix lasse :

— Daubrecq s’était vengé. Le lendemain même du jour où mon mari chassait de la maison notre malheureux enfant, Daubrecq nous dévoilait, dans la plus cynique des lettres, le rôle odieux qu’il avait joué et les machinations grâce auxquelles il avait réussi à pervertir notre fils. Il continuait ainsi : « La correctionnelle un de ces jours… Plus tard les assises… et puis, espérons-le, l’échafaud. »

Lupin s’exclama :

— Comment ? c’est Daubrecq qui aurait comploté l’affaire actuelle ?

— Non, non, il n’y a là qu’un hasard. L’abominable prédiction n’était qu’un vœu formulé par lui. Mais combien cela me terrifia ! J’étais malade à ce moment. Mon autre fils, mon petit Jacques, venait de naître. Et chaque jour nous apprenait quelque nouveau méfait commis par Gilbert, de fausses signatures données, des escroqueries… si bien qu’autour de nous, nous annonçâmes son départ pour l’étranger, puis sa mort. La vie fut lamentable, et elle le fut d’autant plus quand éclata l’orage politique où mon mari devait sombrer.