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Il se raidit. Un bruit de pas approchait.

Daubrecq entra.

Il entra sans un mot, fit signe à Lupin qui s’était levé de se rasseoir, s’assit lui-même devant la table et, regardant la carte qu’il avait conservée :

— Le docteur Vernes ?

— Oui, monsieur le député, le docteur Vernes, de Saint-Germain.

— Et je vois que vous venez de la part de Mme Mergy… votre cliente, sans doute ?

— Ma cliente occasionnelle. Je ne la connaissais pas avant d’avoir été appelé auprès d’elle, tantôt, dans des circonstances particulièrement tragiques.

— Elle est malade ?

Mme Mergy s’est empoisonnée.

— Hein !

Daubrecq avait eu un sursaut, et il reprit, sans dissimuler son trouble :

— Hein ! Que dites-vous ? Empoisonnée ! Morte, peut-être ?

— Non, la dose n’était pas suffisante. Sauf complications, j’estime que Mme Mergy est sauvée.

Daubrecq se tut, et il resta immobile, la tête tournée vers Lupin.

— Me regarde-t-il ? A-t-il les yeux fermés ? se demandait Lupin.

Cela le gênait terriblement de ne pas voir les yeux de son adversaire, ces yeux que cachait le double obstacle des lunettes et d’un lorgnon noir, des yeux malades, lui avait dit Mme Mergy, striés et bordés de sang. Comment suivre, sans voir l’expression d’un visage, la marche secrète des pensées ? C’était presque se battre contre un ennemi dont l’épée serait invisible.

Daubrecq reprit au bout d’un instant :

— Alors Mme Mergy est sauvée… Et elle vous envoie vers moi… Je ne comprends pas bien… Je connais à peine cette dame.

Voilà le moment délicat, pensa Lupin. Allons-y.

Et, d’un ton de bonhomie où perçait l’embarras de quelqu’un qui est timide, il prononça :

— Mon Dieu, monsieur le député, il y a