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Page:Leblanc - Le Prince de Jéricho, paru dans Le Journal, 1929.djvu/41

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« Mon secret d’amour demeure profondément caché dans mon cœur solitaire… »

Un secret d’amour ! Rien ne pouvait l’outrager davantage. Elle ouvrit le hublot et jeta le volume dans la mer.

Elle ne s’endormit qu’au matin, d’un sommeil lourd et sans rêves.

Quand elle se réveilla, vers la fin de l’après-midi, le Nénuphar ne bougeait plus. Le halètement des machines avait cessé. Par le hublot, elle vit un quai, où roulaient des voitures, où se dressaient des maisons. S’étant habillée vivement, elle sortit et appela le capitaine Williams.

— Eh bien, où sommes-nous ?

— À Palerme.

Elle chercha des yeux et ne vit ni Ellen-Rock ni l’Italienne.

— Où est-il ? demanda-t-elle.

— Parti.

— Hein ? Parti ?

— Oui, un simple adieu « Je vous remercie, capitaine. » Il a voulu me donner cinq cents francs pour l’équipage. J’ai refusé. Alors il a froissé les cinq billets et les a jetés à la mer. Ensuite, il m’a confié une lettre pour vous, mademoiselle. Et il s’est éloigné avec sa compagne, pas plus gêné qu’un voyageur qui a fait une bonne traversée sur un bon bateau. Ah ! le damné personnage !…

Le capitaine tira de sa poche une lettre qu’il tendit à la jeune fille et qu’elle décacheta nerveusement. Quelques lignes étaient griffonnées au crayon.

« Il y a deux ans, quand votre père est mort subitement en Sicile, Jéricho s’y trouvait. Certaines révélations que j’ai obtenues de Pasquarella Dolci, l’Italienne qui m’accompagne, me donnent à croire qu’ils s’y sont rencontrés. Une automobile vous attend près du débarcadère, devant l’église Santa Lucia. Elle vous conduira en quelques heures au village de Castelserano, non loin du temple de Ségeste. Une chambre est retenue pour vous à l’auberge principale. Demain matin, vous voudrez bien, vers dix heures, monter tout en haut du village, à la Casa Dolci.

»  Hommages respectueux,

« Ellen-Rock. »

Nathalie n’hésita point. Libre, elle ne songea qu’à s’enfuir une troisième fois et à reprendre la mer. Le capitaine lui dit qu’il fallait attendre le retour d’une partie de l’équi-