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LES DOUZE BOUTEILLES

connue dans le commerce courant. C’est bien invraisemblable, me semble-t-il ?

Romain Delbot était un peu pâle. La vérité lui échappait et pourtant… Et pourtant… Cet avocat si sûr de lui, n’avait-il pas pu personnellement, au lendemain de la partouse, remplacer le panier de champagne entamé par un panier neuf ? Mais il ne pouvait pousser à fond son attaque, il n’avait pas de preuves suffisantes. Il fallait, pour le moment, être prudent, admettre les apparences.

— Évidemment… Évidemment… dit-il. La piste est mauvaise, et celui de mes inspecteurs qui me l’a indiquée a fait erreur… Mais, mon cher maître, est-ce aussi une erreur qu’a faite un autre de mes inspecteurs lorsqu’il affirme que la danseuse Isabella est venue vous voir avant de se livrer à la Justice ?

— Oui, répondit Patrice, c’est une erreur.

Delbot, exaspéré, ne put s’empêcher d’insister.

— Cependant mon inspecteur a suivi, pour ainsi dire pas à pas, les traces de la jeune femme depuis son départ de Saint-Cucufa, jusqu’à cette maison, où elle est entrée le lendemain matin.

— Dans cette maison peut-être, pas chez moi en tout cas. D’ailleurs serait-elle venue que je l’aurais oublié. Ne savez-vous pas, brigadier, qu’un secret absolu protège les personnes qui viennent consulter un avocat ?

— Heureusement que je puis avoir d’autres renseignements, dit Delbot entre ses dents.

— Ah ? Puis-je savoir lesquels ?

— Je vais mettre la main au collet de Julot ; j’ai découvert la retraite où il se cache.

— Vous croyez donc à la culpabilité de cet homme ? Elle semble, il est vrai, assez probable.

Le policier ne répondit pas à cette dernière assertion. Il expliqua :

— Julot, dès l’arrivée de l’auto de maître, a eu le loisir d’examiner les nouveaux venus. La femme portait un collier de perles que les deux danseuses ont vu et qu’il a vu lui-même. « Quelles perlouzes ! » s’est-il écrié dans son argot. Or les deux danseuses sont persuadées que les manigances de la Pierreuse qui caressait toutes les femmes et leur sautait au cou, avaient pour but le vol