Page:Leblanc - Le triangle d'or, paru dans Le Journal, du 20 mai au 26 juil 1917.djvu/174

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Si, mon capitaine, une couronne.

— Pas autre chose ?

— Non, mon capitaine.

La fenêtre était ouverte. Patrice en conclut que les objets avaient pris ce chemin, et son hypothèse d’une complicité inconsciente du bonhomme en fut confirmée.

Un peu avant dix heures, Coralie le rejoignit dans le jardin. Patrice l’avait mise au courant des derniers incidents. La jeune femme était pâle et inquiète.

Ils firent le tour des pelouses et gagnèrent sans être vus les bosquets de fusains qui dissimulaient la porte de la ruelle.

Patrice ouvrit cette porte.

Au moment d’ouvrir l’autre, il eut une hésitation. Il regrettait de n’avoir pas prévenu M. Desmalions, et d’accomplir, seul avec Coralie, ce pèlerinage que certains symptômes annonçaient comme dangereux. Mais il secoua cette impression. Il avait eu soin de prendre deux revolvers. Qu’y avait-il à craindre ?

— Nous entrons, n’est-ce pas, Coralie ?

— Oui, dit-elle.

— Cependant, vous semblez indécise, anxieuse…

— C’est vrai, murmura la jeune femme, j’ai le cœur serré.

— Pourquoi ? Vous avez peur ?

— Non… ou plutôt si… Je n’ai pas peur pour aujourd’hui, mais en quelque sorte pour autrefois. Je pense à ma pauvre mère qui a franchi cette porte comme moi, par un matin d’avril. Elle était tout heureuse, elle allait vers l’amour… Et alors c’est comme si je voulais la retenir et lui crier : « N’avance pas… la mort te guette… n’avance pas… » Et, ces mots d’effroi, c’est moi qui les entends… ils bourdonnent à mon oreille… et c’est moi qui n’ose plus avancer. J’ai peur…