Page:Leblanc - Les Lèvres jointes, paru dans Le Journal et La Lanterne, 1897-1901.djvu/180

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Elle l’enlaça. Ses bras le bercèrent. Avec le revers de ses mains, elle essuyait ses yeux et ses joues. Et en elle, les mots se formaient, les mots de délivrance qui allaient l’apaiser et le guérir. Elle riait déjà du bon tour qu’elle lui avait joué. Comme il rirait, lui aussi !

Les mots se formaient. Ils montaient à ses lèvres. Pourtant… pourtant, elle ne les prononçait pas…

Du temps passa. Les sanglots du malheureux s’alanguissaient, comme la fin d’une agonie.

Elle l’écoutait, rêveuse. Et elle ne parlait pas. À quoi bon parler ! Un jour ou l’autre ne le tromperait-elle pas, réellement, cette fois ? Elle n’avait jamais douté de cette trahison, certaine, indispensable. Alors, puisque l’aveu était fait, pourquoi n’en pas profiter ? Pourquoi recommencer plus tard cette scène pénible, puisqu’il avait accepté. puisque c’était chose convenue, pardonnée ? Ne valait-il pas mieux garder cette position avantageuse, cette sorte d’affranchissement ?

Elle le baisa au front et lui dit, toute en larmes :

— Mon pauvre chéri, comme tu es bon… comme tu es meilleur que moi !