Page:Leblanc - Les Lèvres jointes, paru dans Le Journal et La Lanterne, 1897-1901.djvu/3

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Celle qui attend



Au retour d’une excursion que je fis à Domfront, mon voisin de table, un habitué de la station thermale où je passais l’été, me dit :

— Vous l’avez vue ?

— Qui ?

— Comment ! Mais la demoiselle… la demoiselle du jardin public…

Je ne comprenais pas, il s’expliqua :

— Vous avez dû remarquer, dans la rue principale, une vieille petite maison flanquée de tourelles et dont le seuil s’abrite sous un toit d’ardoises.

— … Soutenu par des colonnes de bois sculpté ?

— Vous y êtes. Eh bien, c’est là qu’elle demeure, toute seule, dernier rejeton d’une famille noble aujourd’hui ruinée. Sauf le curé et quelques vieillards, elle ne reçoit personne. Quelquefois, on la rencontre dans les rues les plus désertes, où le bruit de ses pas ne dérange pas le silence. Mais, tous les jours, à la fin de l’après-midi, on est certain de la