Page:Leblanc - Les Lèvres jointes, paru dans Le Journal et La Lanterne, 1897-1901.djvu/88

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Sans y attacher d’importance, ils se laissaient surprendre aux bras l’un de l’autre et les lèvres jointes. Et sans nulle coquetterie — cela était incontestable — mais par la force des choses, la femme se montrait souvent vêtue de façon sommaire, la gorge presque nue, les jambes visibles à travers les loques et les oripeaux.

Quelle impression devait subir le malheureux au spectacle de ces baisers et de cette chair ? Jeune et robuste, que ressentait-il durant les nuits ardentes, quand il évoquait l’étreinte proche de ses deux compagnons, l’abandon de la femme, la folie et le spasme de ce corps dont il savait le secret merveilleux ?

L’époux imagina les tortures possibles, certaines, de ce colosse aux appétits puissants et jamais assouvis. Il discerna que son besoin de solitude n’était que le désir de fuir le danger, et que les énormes travaux qu’il entreprenait à la fois aboutissaient à de bienfaisantes fatigues. Et il eut vraiment pitié de lui.