Sans chercher à comprendre le sens des paroles, Lucie l’écoutait. Il avait une voix d’un charme inexprimable qui prêtait de la douceur aux sons rauques de sa langue. S’il se taisait, elle l’interrogeait pour que ne cessât point l’ivresse subie. Et il continuait, de son accent profond et sincère, aux inflexions chantantes. Elle fit de telles acquisitions et à des prix si élevés que son mari le lui reprocha vivement. Elle n’en fréquenta pas moins Markoff, mais en cachette le plus souvent, et sans rien acheter.
Le mauvais temps persistait. Peu de personnes se risquaient à la foire. Elle s’oubliait auprès de lui, sans redouter de fâcheuses rencontres. Parfois la pluie chassait avec tant de violence que Lucie montait une marche et s’abritait à l’entrée de la cabane.
Dès les premiers jours, elle le tutoya, naturellement, sans effort, comme un être de race inférieure à la sienne. Markoff, que guidait son flair de marchand âpre au gain, la traitait en idole. Cette aventure l’intimidait. Il ne savait au juste ce que lui voulait cette femme. Aussi, craignant de l’irriter, il se contentait de la regarder avec extase. Il avait des silences rêveurs et des mélancolies significatives.
Elle, l’accablait de ses coquetteries les plus savantes. Elle lui servit tout son répertoire de grâces mièvres et de petits cris badins. Elle eut