Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/194

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Habituellement hautaine et dure, la voix avait pris une inflexion douce. Le visage se détendait en un sourire. Et les yeux, les yeux impitoyables, avaient une tristesse touchante.

Elle demanda :

— Pourquoi me traitez-vous comme une ennemie ?

Lucie ne répondit pas, toute remuée. Et l’autre continuait :

— Ne soyez plus ainsi, cela me fait mal. J’aurais tant aimé vous plaire et devenir votre amie, votre seule amie… Vous êtes si belle !

Mme  Chalmin crut comprendre. Une légère répulsion, mêlée de crainte, la pénétra. Elle résolut d’éviter les tête-à-tête.

Pourtant, le lendemain, ce fut elle-même qui l’appela, au sortir de l’eau, d’un ton de défi :

— Vous cherchez une cabine ! Voulez-vous la moitié de la mienne ? Vous vous déshabillerez pendant que je me rhabillerai.

La cabine était peu spacieuse, leurs mouvements se contrariaient. Mme  Miroux dit :

— J’attendrai que vous soyez prête.

Mais comme Lucie se plaignait du froid, elle saisit une serviette. Des gouttes d’eau ruisselaient sur les bras et sur les épaules. La chair frémissait. Elle frotta vigoureusement jusqu’à ce que le sang affluât à la peau.

— Ça va-t-il mieux ?