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Page:Leblanc - Une femme, 1893.djvu/229

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— Allons, cède-moi la place et tais-toi, je te le conseille.

Il prit le bras de sa filleule. Paul s’empara de l’autre. Et ils la tirèrent au risque de la blesser. Mais une honte les arrêta. Lucie suppliait :

— Je vous en prie, je vous en prie, je ferai ce que vous voudrez…

Eux se mesuraient du regard, les poings fermés. Le père cracha : « Misérable. » Le fils eut un mouvement de fureur. Lui aussi mâchonna une injure. Et ils étaient prêts à se jeter l’un sur l’autre, ramassés comme deux fauves qui convoitent une femelle.

À cet instant Mme Bouju-Gavart apparut. Elle sentit, à l’attitude de Paul et de son mari, qu’une altercation s’était élevée. Elle voulut confesser la jeune femme. Elle échoua.

Mais une heure après, Paul lui confiait les relations scandaleuses de son père et de Mme Chalmin, et le soir, à son tour, M. Bouju-Gavart achevait de l’édifier :

— Je ne puis garder le silence. Nous protégeons ici des infamies dont nous sommes presque complices. Cette gueuse de Lucie est la maîtresse de Paul, j’en ai les preuves.

Le lendemain était un dimanche. Robert vint à Croisset. Au déjeuner, Mme Bouju-Gavart profita d’un mot de Lucie pour la reprendre assez durement. Elle recommença plusieurs fois