« Tous ceux qui ont une existence à part me captivent… Celui-là… tous les autres… doivent éprouver des émotions puissantes.
— Mais non, mais non, s’écria-t-il en riant, ne croyez pas cela… Ce sont des émotions auxquelles on s’habitue… On finit par agir aussi tranquillement qu’un brave bourgeois qui fait sa partie de manille. Évidemment, il y a des minutes pénibles, mais c’est rare. Presque toujours, pour peu qu’on y ait la main, ça se passe en douceur. Ainsi on m’a indiqué… »
Il s’interrompit, et se leva, prêt à partir.
« Excusez-moi… j’abuse de vos instants… »
Elle le retint, tout de suite animée et curieuse :
« On vous a indiqué ?…
— Oh ! rien…
— Si, racontez-moi…
— Non, je vous assure… Il s’agit d’un malheureux bracelet… Eh bien, d’après ce qu’on m’a dit, je n’aurais qu’à le cueillir… Aucune émotion… Une simple promenade… »
Il allait ouvrir la porte. Elle lui saisit le bras. Il se retourna, et elle demanda, les yeux hardis, avec toute la provocation d’une femme qui n’admet pas de refus :
« À quand la promenade ?
— Pourquoi ? vous voulez en être ?
— Oui, je le veux… je m’ennuie tellement !
— Et ce serait une distraction ?
— En tout cas, je verrais… j’essaierais… »
Il prononça :
« Après-demain, deux heures, rue de Rivoli, dans le square Saint-Jacques. »
Sans attendre la réponse, il sortit.