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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/137

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qu’il demande à Lélia de maudire l’orgueil qui fit d’elle un ange déshérité. Mais la publication de M. Guinaudeau nous a révélé une autre Lélia dans la solitude où le poète encourage au contraire Lélia à la rébellion :


À quoi bon, Lélia, tout ces regrets infimes ?
Ne laisse pas longtemps tes deux ailes sublimes
                    S’engourdir dans le deuil !
          Vers le ciel irrité lève ta forte tête :
Le courage n’est beau qu’au sein de la tempête.
                    Le génie esl l’orgueil[1].


Et si l’on cherche à savoir quel est ce Dieu contre lequel s’est révoltée Lélia, trouve-t-on Dieu ou des dieux ?


Ô femme, que fais-tu en face de Dieu ?
Ce rayon immortel, la sereine prière,
N’éclot point sur ta lèvre et ton cœur est de pierre !
Car les dieux ne sont plus l’amor et l’harmonie.


L’amour, harmonie parfaite entre les Hommes ; harmonie, équilibre d’amour entre les éléments, tel est le Dieu vers qui exalte son rêve :


Ô mon Dieu, se peut-il que l’homme vous renie !
Vous dont la main puissante a dispensé pour nous
Votre amour dans les cœurs, dans les cieux l’harmonie.


La prière, c’est la rêverie de l’être s’élevant dans le songe de la Nature, c’est l’extase de la solitude humaine soulevée vers les cieux :


Ange déshérité, contemple la lumière
Dans ce rêve divin qu’on nomme la prière.


La prière est un rêve, Dieu est le plus sublime

  1. Cf. Kaïn.