Page:Leconte - Le Bouclier d’Arès, 1897.djvu/152

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Xerxès, le Roi des Rois, l’Archer akhéménide,
Entouré des dix mille Immortels, et pareil
Au disque éblouissant et muet du soleil,
Siégeait, silencieux, sur son thrône splendide.

Mais aux pieds du Grand Roi, sinistre et flamboyant,
Sur l’Aigée écumeux dressant sa haute barre,
L’entassement confus de la flotte barbare
Montait vers nous, farouche et sombre, en s’éployant,

Avec ses avirons battants, ses hautes guibres,
Qui heurtaient des tridents de bronze, au rauque appel
Du sistre et de la conque aiguë : et l’archipel
Des carènes domptait l’essor de nos eaux libres.

Tous étaient là ; l’Égypte et Sidon et Byblos,
Chypre et la Cilicie et l’Ionie esclave,
Et Tyr dont les vaisseaux portent à leur étrave
L’emblème avec les noms du laboureur des flots.

Et nous, les bras tendus vers les Vengeurs suprêmes,
Nous écoutions venir, sous le ciel haletant
Où le cri des buccins s’envolait par instant,
L’égal et calme effort de douze cents trirèmes.

Et pourtant, dans le soir panique, tout a fui.
L’immense armée au vent roule comme une écume :
Le Mède a succombé, cependant que s’allume
Sur les sommets divins la triomphale nuit.