Page:Leconte de Lisle - Œuvres, Poèmes antiques.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
17
BHAGAVAT.

Qui sur ton cou d’albâtre enroules tes cheveux ;
Reçois, belle Ganga, l’offrande de mes vœux.
Mon malheur est plus fort que ta pitié charmante,
Ô Déesse ! Le doute infini me tourmente.
Pareil au voyageur dans les bois égaré,
Mon cœur dans la nuit sombre erre désespéré.
Ô Vierge, qui dira ce que je veux connaître :
L’origine et la fin et les formes de l’Être ?

Sous un rayon de lune, au bord des flots muets,
Tels parlaient tour à tour les sages inquiets.



GANGA


Quand de telles douleurs troublent l’âme blessée,
Ô brahmanes chéris, l’attente est insensée.
Si le remède est prêt, les longs discours sont vains.
Levez-vous, et quittez le fleuve aux flots divins,
Et la forêt profonde où son beau cours commence.
Ô sages, le temps presse et la route est immense.
Par delà les lacs bleus de lotus embellis,
Que le souffle vital berce dans leurs grands lits,
Le Kailaça céleste, entre les monts sublimes,
Élève le plus haut ses merveilleuses cimes.
Là, sous le dôme épais des feuillages pourprés,
Parmi les kokilas et les paons diaprés,
Réside Bhagavat dont la face illumine.
Son sourire est Mâyâ, l’Illusion divine ;
Sur son ventre d’azur roulent les grandes Eaux ;
La charpente des monts est faite de ses os.