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POÈMES ANTIQUES.

Héritiers incertains d’un antique trésor,
Sans force et dispersés, que te faut-il encor ?
Oui, les temps sont mauvais, non pas pour ton église,
Mon père, mais pour nous que ton orgueil méprise,
Pour nous qui n’enseignons, dans notre abaissement,
Que l’étude, la paix et le recueillement.
Tourne au passé tes yeux ; rappelle en ta mémoire
Les destins accomplis aux jours de notre gloire.
Nos Dieux n’étaient-ils donc qu’un rêve ? Ont-ils menti ?
Vois quel monde immortel de leurs mains est sorti,
Ce symbole vivant, harmonieux ouvrage
Marqué de leur génie et fait à leur image,
Vénérable à jamais, et qu’ils n’ont enfanté
Que pour s’épanouir dans l’ordre et la clarté !
Quoi ! ce passé si beau ne serait-il qu’un songe,
Un vrai spectre animé d’un esprit de mensonge,
Une erreur séculaire où nous nous complaisons ?
Mais vous en balbutiez la langue et les leçons,
Et j’entends, comme aux jours d’Homère et de Virgile,
Les sons qui m’ont bercée expliquer l’Évangile !
Ah ! dans l’écho qui vient du passé glorieux
Écoute-les, Cyrille, et tu comprendras mieux.
Écoute, au bord des mers, au sommet des collines,
Sonner les rythmes d’or sur des lèvres divines,
Et le marbre éloquent, dans les blancs Parthénons,
Des artistes pieux éterniser les noms.
Regarde, sous l’azur qu’un seul siècle illumine,
Des îles d’Ionie aux flots de Salamine,
L’amour de la patrie et de la liberté