Aller au contenu

Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
129
dianora


Nous ne nous chargerons point d’expliquer comment il se fit que Dianora eût si promptement oublié le serment fait à Puccinelli de ne jamais appartenir qu’à lui. Cette histoire n’est nullement de notre imagination, mais bien une fidèle narration d’événements véritables. La rumeur publique accusa Dianora de frivolité et d’inconstance, accusation dont elle ne démontra que trop la fausseté plus tard. Quelques personnes la blamèrent de sa docilité à obéir aux ordres de sa tante ; mais ces personnes furent bientôt à même de reconnaître le peu de fondement de leurs reproches, quand il ne leur fut plus possible de s’illusionner sur le caractère indomptable de cette jeune femme. Nous sommes donc portés à croire qu’elle avait une grande haine pour Bonaccorso, et qu’elle ne s’était unie à lui que par un raffinement de cruauté. Pourtant il est possible que les belles qualités et la passion sincère de son mari eussent amolli son cœur, si Puccinelli ne se fût jamais représenté à ses yeux.

Ainsi s’accomplit cette union, qui devait être fatale aux deux rivaux.

Bonaccorso,en homme fort amoureux de sa femme, l’entourait de mille attentions délicates ; ses moindres caprices étaient des lois pour lui. Tout le patriciat de Lucques était incessamment convié aux fêtes que prodiguait le nouvel époux. Les jeunes cavaliers enviaient son bonheur et