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la princesse yaso'da

mais le démon, pressé par la nécessité, leur dit en adoucissant sa voix : — Tamaya, le jeune guerrier, m’envoie vers la perle du monde.

Yaso’da suspendit sa course et dit : — Ô génie, est-il vrai ?

— Telle est la vérité. Le jeune tigre veut que la belle vierge du Lasti-D’jumbo vienne le consoler, ou il mourra de douleur ; car le pieux roi lui défend de revenir.

– Où est-il ?

– Il se lamente dans ma demeure, à la cime du Jougando. Je suis le serviteur de Tamaya. Si la perle du monde aime le jeune guerrier, elle se confiera à moi, et dans une heure je la rapporterai au palais du saint roi.

— Je le veux, dit la vierge royale.

L’amour est plein de courage. — L’amour est comme la flèche repoussée par la corde tendue. — Il vole et se brise, mais il ne s’arrête pas de lui-même. — L’amour n’a qu’un regard, il ne voit qu’une chose. — Cette chose qu’il voit emplit le monde.

Alors, malgré les lamentations de ses compagnes, Yaso’da s’assit sur une des ailes du démon Hyayagriva, lequel tourbillonna dans la brume du soir et disparut.

Ce fut ainsi que le démon se vengea du pieux roi qui l’avait délivré.

Or, le pieux roi, au moment où sa fille bien-aimée était