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une peau de tigre


Emportez l’encens de nos fleurs
De nos montagnes à nos grèves,
Mais du moins laissez-nous les pleurs
Qu’elles versent dans leurs doux rêves !

Ô chimères, flots inconstants !
Éclairs d’amour et de jeunesse,
Qui ravissez en peu d’instants
L’espoir, sans crainte qu’il renaisse !

Vous êtes les brises du cœur,
Illusions, baisers, haleines !
Et lorsque nos âmes sont pleines,
Vous fuyez, chant doux et moqueur !


Ici lady Edith jeta le livre sur le divan avec impatience et voulut se lever, mais la blonde qui garnissait sa robe s’arrêta entre les dents du tapis et se déchira. Alors elle reprit sa première position, se mit à contempler la peau du tigre et finit par pleurer.

Quelque bonne opinion que l’auteur ait conçue de ses lecteurs, il se permettra dans ce moment de douter de leur pénétration. En effet, savent-ils bien pourquoi la peau de tigre, l’inquiétude de lady Edith et ses larmes ? L’auteur