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Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/81

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la mélodie incarnée


CARL.

O tempora, ô mores !

GEORGE.

Verse-moi de la bière, Jacques. Ma gorge est sèche comme un four, au seul souvenir de cette époque déplorable.

JACQUES.

C’était une chose merveilleuse que de s’asseoir au coin des hautes cheminées, durant les soirs d’hiver. Les chats noirs prophétisaient les pattes dans la cendre, et les grillons, blottis dans la suie, racontaient des chroniques d’amour aux vieilles marmites chevrotantes.

CARL.

Ma grand’mère ne pouvait conserver un manche à balai huit jours durant : les sorcières du Hartz se fournissaient chez elle. Il y eut même, dans ce temps-là, un pauvre diable d’étudiant qui, ayant fait à son insu la conquête d’une chauve-souris, laquelle n’était autre qu’un esprit femelle de la montagne, se cassa le cou en tombant dans la rue du haut d’un toit où il prenait l’air avec sa bien-aimée ! C’est une histoire fort curieuse que je vais vous raconter en détail.