Page:Leconte de Lisle - Eschyle (Lemerre, 1872).djvu/105

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de joie par les citoyens de cette terre. Et vous, chères servantes, suivez chacune, pas à pas, celle des filles de Danaos qu’il vous aura désignée.

Danaos

Ô enfants ! il faut que vous fassiez des vœux et des sacrifices et que vous versiez des libations aux Argiens comme à des Dieux olympiens, puisqu’ils nous ont sauvés sans hésiter. Ils ont écouté avec une grande faveur ce que j’ai fait contre nos cruels parents, et ils m’ont donné ces compagnons et ces gardes afin de m’honorer et pour que je ne fusse pas frappé par surprise d’un trait mortel, ce qui eût été pour cette terre une souillure éternelle. Après tout ceci il convient que vous leur rendiez grâces et que vous les honoriez plus que moi-même. Gardez cette parole dans votre mémoire avec tous les autres sages conseils de votre père : le temps seul montre ce que valent des inconnus. Chacun a une langue médisante contre l’étranger, et ses paroles excitent aisément les malveillants. Je vous avertis donc de ne point me couvrir de honte, puisque vous possédez la jeunesse qui charme les hommes. La belle maturité est difficile à garder : les bêtes fauves et les hommes, ce qui vole et ce qui rampe, tous l’entourent d’embûches. La beauté des fruits mûrs les fait cueillir et ne donne point de vains désirs. Ainsi chaque passant lance de ses yeux le trait du désir sur la beauté et le charme des jeunes filles. Ne nous attirons point ces malheurs que nous avons évités par notre navigation sur la grande mer. Ce serait une honte pour nous et une joie pour nos ennemis. Deux demeures nous sont offertes : celle de Pélasgos et celle de la Ville, et toutes deux sans rien