Page:Leconte de Lisle - Eschyle (Lemerre, 1872).djvu/126

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lâchement la mort et le combat. En criant ainsi, il secoue les épaisses aigrettes, crinière de son casque ; et les clochettes d’airain qui pendent de son bouclier sonnent la terreur. Il porte sur ce bouclier un emblème orgueilleux, l’Ouranos resplendissant d’astres ; et, au centre, Sélènè, éclatante et pleine, reine des étoiles, œil de la nuit, rayonne. Furieux, et fier de ses armes magnifiques, il pousse des clameurs sur les rives du fleuve, avide du combat, comme l’étalon, haletant contre le frein, qui s’emporte, désirant le son de la trompette. Qui lui opposeras-tu ? Qui défendra la porte de Proitos, les barrières une fois rompues, et aura la force de le contenir ?


Étéoklès


Je ne redoute point des ornements guerriers. Les emblèmes ne font pas de blessures, les aigrettes et les clochettes ne mordent point sans la lance. Cette nuit, que tu dis être ciselée sur le bouclier et qui resplendit des astres de l’Ouranos, est peut-être un signe fatal pour cet homme. Si la nuit tombe sur ses yeux mourants, cet emblème orgueilleux aura été pour qui le porte un présage véritable et certain, et il aura prédit lui-même le terme de son insolence. Moi, j’opposerai à Tydeus, comme défenseur de la porte, le brave fils d’Astakos, issu d’une race illustre, trône du devoir, qui hait les paroles impudentes, qui méprise la honte et n’a point coutume d’être un lâche. Mélanippos, enfant de cette terre, est issu des guerriers nés des Dents semées, de ceux qu’Arès épargna. Arès décidera du combat par ses dés ; mais il est juste que Mélanippos détourne la lance ennemie du sein de la mère qui l’a conçu.