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Le destin noir me suit comme un cerf aux abois.
Jeunesse, amour, bonheur, et la vie à la fois,
Je perds tout. Sauve-moi. Je sais qu’à ta parole
Le ciel devient plus sombre ou l’orage s’envole.
Tu peux, par la vertu des incantations.
Alléger le fardeau des malédictions ;
Tu peux, sans altérer l’implacable justice,
Émousser sur mon cœur le fer du sacrifice.
Réponds donc. Si le roi des vautours a dit vrai,
Tu feras deux heureux, mon père, et je vivrai.

Et l’Ascète immobile écoutait sans paraître
Entendre. Et le jeune homme étonné reprit : — Maître,
Ne répondras-tu point ? Et le maigre vieillard
Lui dit sans abaisser son morne et noir regard :