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La victoire de la Marne


Ce chaos de ferraille, c’est tout ce qu’il reste d’un convoi d’automobiles allemand « reçu » par notre artillerie dans la forêt de Villers-Cotterêts…
(Cl. Meurisse.)


Elle brillera d’un éclat magnifique parmi les victoires françaises, cette bataille de la Marne qui, changeant soudain la face des choses, imprimant à la guerre une tournure nouvelle, a sauvé Paris d’une menace, grandissante, fait reculer l’envahisseur et préparé la délivrance du sol national. Dans l’émouvant récit qu’on va lire on suivra les péripéties de cette formidable lutte de sept jours. On aura l’impression de ce qu’est une bataille moderne où, sur un front démesurément étendu, la bataille se fractionne en une série d’engagements partiels. Par-dessus tout, on éprouvera une admiration sans limites pour la bravoure et l’endurance nos troupes et pour l’esprit de décision et l’habileté de leurs chefs. Avec de tels hommes, comment ne pas concevoir les plus belles espérances et envisager avec une confiance inébranlable l’issue finale qui assurera la victoire du droit et de la civilisation.



Nous étions en retraite depuis Charleroi. Le vaste mouvement de recul que le secret d’une tactique prévoyante et hardie avait imposé à nos vaillantes troupes s’était accompli avec un sang-froid, une souplesse et une méthode admirables. Nous avionsfranchi là Sambre, puis la Somme, puis l’Aisne, disputant pied à pied nos collines, nos vallées, nos rivières, nos plaines à la trombe de fer et de feu déchaînée par l’ennemi. Derrière nous des lueurs d’incendie marquaient ses progrès… Où cette formidable pression allait-elle s’arrêter ? Chaque soir à l’entrée des villages, au seuil des bois, au cœur des forêts, nos volte-face continuelles brisaient l’élan de l’adversaire, lui barraient pour quelque temps la route chaque soir, après une longue marche qui avait paru interminable, nos hommes frémissants et résolus, dans un effort héroïque trouvaient le moyen de rejeter et de décimer les audacieuses avant-gardes de uhlang chaque matin néanmoins, il fallait abandonner le terrain gagné la veille.

C’était l’ordre.

Parce que les forces allemandes cherchaient et parvenaient constamment, depuis la frontière belge, à déborder notre aile gauche la seule manœuvre qui pût enrayer les progrès de ce débordement avant qu’il ne devienne un enveloppement, c’était d’aller chercher l’appui de l’armée et des forts de Paris.