Page:Lefèvre-Deumier - Confidences, 1833.djvu/34

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Si le jour, en partant, nous emporte des songes,
D’autres songes, plus grands, remplacent leurs mensonges.
L’ombre a son éloquence et ses leçons : le soir
Sait, au champ du passé, reconduire l’espoir ;
Et sur l’ébène obscur de ses pages brodées,
La nuit enfin nous ouvre un nouveau cours d’idées.
La nuit, en les voilant, semble élargir les airs,
Et, comme la pensée, agrandir l’univers,
Si c’est penser encor, que d’oublier qu’on pense ;
Sur le seuil du sommeil, on change d’existence.

Quand les arbres, couverts d’un linceul de vapeurs,
Alongent devant nous leurs fantômes trompeurs :
Quand on voit, à travers les buissons des ravines,
Un torrent de brouillards ruisseler des collines :
Quand on entend les eaux gémir sur le gravier,
Ou mariant sa plainte aux soupirs du pluvier,
L’airain patriarcal des dernières prières,
Jeter une voix sainte aux genêts des clairières :