Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/224

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N’a vaincu qu’à demi leurs colonnes trapues,
Dont les lignes debout ne se sont pas rompues.
Voilà cette cité, mère de conquérants,
Où l’on vit les plaisirs, voluptueux tyrans,
Envahissant les mœurs qui font les grands courages,
De l’avenir armé dédaigner les orages :
Où, tandis que le ciel suspendait sur ces bords
Ses nuages, chargés de sentences de morts,
Rome ne comptait plus ici que des convives,
Buvant les vins fleuris dans des coupes lascives,
Soldats obéissants aux luths de Sybaris,
Qui fuyaient leurs aïeux dans les bras de Cypris.

Des clairons profanés les chants blasphématoires
Ne célébraient alors que d’impures victoires,
Et, comme les humains, les dieux dégénérés
Végétaient, dans l’encens, sur leurs autels dorés.
Courtisane d’un ciel énervé de délice,
Des plus folles amours Minerve était complice,
Et Paies, négligeant les utiles moissons,
Laissait le blé mourir sous l’éclat des buissons :
La richesse des fleurs appauvrissait Cybèle.
Quoique pis que la mort, cette vie était belle ;
Rien n’existe à présent : tout est cendre et lambeau.
Le temple de Cérès n’est plus qu’un grand tombeau.