Page:Lefrançais - Étude sur le mouvement communaliste à Paris, en 1871.djvu/395

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 389 —

ce ne sera pas par cent mille, comme en mai 1871[1], mais par plusieurs fois cent mille qu’il faudra procéder au massacre des travailleurs !

Aussi cette perspective fait-elle frissonner de terreur la bourgeoisie intelligente, non, encore une fois, parce que cette perspective épouvante son humanité, mais seulement parce qu’alors la production elle-même deviendrait à son tour une insoluble question.

Et puis enfin, la victoire, en dernière analyse, est toujours aux gros bataillons, et alors que deviendront les honnêtes gens, c’est-à-dire ceux qui vivent du travail …d’autrui ?

Juin 1848 a tenu, durant quatre jours, la vieille société en échec, et le prolétariat de Paris avait pourtant contre lui la garde nationale bourgeoise, la garde mobile, les 30,000 hommes de troupes que Ledru-Rollin et ses amis s’étaient empressés de faire rentrer dans la ville, en prévision de ce qui allait se passer, enfin les départements qui, à l’envi l’un de l’autre, envoyèrent leurs gardes nationaux contre les Parisiens en faveur de l’ordre menacé.

Durant deux mois en 1871, les travailleurs ont été les maîtres de la situation ; symptômes alarmants, Lyon, Marseille, Narbonne, Toulouse, Saint-Étienne, Limoges, Vierzon, Cosne, le Creuzot, ont répondu à l’appel de Paris révolutionnaire et, sans la situation hérissée de difficultés que venait de créer l’invasion, c’est-à-dire, sans la protection des Prussiens, guettant aux portes de Paris l’occasion d’intervenir en faveur de Versailles, le gouvernement était contraint de se retirer ; la révolution communaliste triomphait et c’en était fini pour toujours des privilèges économiques qui servent de supports au vieux monde.

  1. Les plus modérés portent à environ 30,000 le chiffre des ouvriers massacrés par la répression des honnêtes gens et à 70,000 au moins celui des arrestations opérées à ce jour. Rappelons que les journaux de l’ex-police impériale, le Figaro en tête, demandaient qu’on fusillât deux cent mille hommes au Champ-de-Mars !