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Page:Legendre - Sabre et scalpel, 1872.djvu/81

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ALBUM DE LA MINERVE.

Chapitre XIX.

COMME il était à sonder les bords du roc, il entendit la voix de Landau assez rapprochée de lui :

Jetez-moi une corde, disait-il, je crois que nous sommes sur la voie d’une découverte.

— Vous n’êtes pas blessé, au moins ? dit Laurens.

— Pas une égratignure.

— C’est bien, attendez un instant.

Laurens détacha une forte ficelle qu’il avait enroulée autour du bras. Il la fixa solidement à un arbuste au bord ne l’ouverture, puis se mit à descendre.

Au bout d’une trentaine de pieds, il toucha sur un plateau où Landau se tenait lui-même.

Après avoir allumé une lanterne sourde, il reconnut que ce plateau était bien le fond du puits, formé d’un sable fin et d’une circonférence de dix ou quinze verges.

Landau était heureusement tombé sur les pieds, et n’avait reçu aucune contusion sérieuse. En examinant les lieux, dans un des angles du puits, les deux hommes découvrirent une ouverture haute d’environ trois pieds, et par laquelle il venait un air frais.

Ils y pénétrèrent, et, au bout de quelques pas, débouchèrent dans un couloir assez vaste qui paraissait s’étendre à une assez grande distance.

— Avant de vous engager plus loin, dit Laurens, allons avertir le reste de nos gens qu’une absence trop longue pourrait inquiéter.

Laurens remonta au haut du puits et alla chercher la petite troupe qu’il établit derrière un bouquet d’arbres avec ordre de faire bonne garde, mais de se tenir constamment hors de vue.

Il prit deux hommes avec lui et redescendit dans le puits, où Landau l’attendait.

Les quatre hommes, ayant alors ôté leurs bottes et chaussé des mocassins, allumèrent une seconde lanterne et s’engagèrent dans le couloir.

Un air humide les frappait au visage, indiquant qu’il y avait une seconde issue.

Laurens et les compagnons marchaient avec précaution, calculant chacun de leurs pas et faisant le moins de bruit possible.

Ils gravissaient d’ailleurs une pente assez rapide par un chemin encombré de quartier de roc et dans une atmosphère suffocante.

Après une demi-heure environ de cette marche pénible, Landau qui tenait les devants crut entendre un bruit de voix.

Il s’arrêta pour écouter et fit un signe aux autres qui restèrent immobiles.

Des bruits sourds montaient jusqu’à eux, et, de temps à autre quelques paroles dont il était impossible de saisir le sens.

— Nous les tenons, dit Landau à voix basse. Attendez-moi un instant ici, je vais aller reconnaître les lieux.

Il continua à ramper pendant une trentaine de pas, au bout desquels il arriva à l’ouverture qui donnait sur la caverne. Cette ouverture débouchant à une vingtaine de pieds du sol de la plus grande caverne, avait un diamètre d’environ trois pieds et était dissimulée par une suite d’anfractuosités profondes et obscures, de sorte qu’à moins d’un hasard extraordinaire, il était impossible de l’apercevoir d’en bas.

Landau, cependant, pouvait tout à son aise examiner l’intérieur de la grotte et le spectacle qui s’offrit à ses regards avait de quoi le frapper.

Une quinzaine de brigands, du milieu desquels se détachaient les honnêtes figures de Beppo et de Luron — étaient assis sur le sable, fourbissant leurs armes et aiguisant d’énormes coutelas. De temps à autre la longue et maigre silhouette de Gilles Peyron apparaissait au milieu des bandits. Il donnait des ordres à voix précipitée et distribuait quelques rasades reçues avec des grognements de plaisir.

Beppo, suivant sa louable habitude, avait déjà la figure fort enluminée.

Quand Landau les eut contemplés pendant quelques instants, il revint sur ses pas, et amena Laurens qui n’en pouvait presque pas croire ses yeux,