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Page:Legouvé - Dernier travail, derniers souvenirs, 1898.djvu/272

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peu à tout le monde, et surtout à lui-même. Je puiserais dans sa correspondance, dans ses mémoires, dans ses préfaces. On le trouverait là, peint de sa propre main, avec la plus fine plume de prosateur, et de ce volume, ainsi composé, sortirait une des figures de poète les plus originales et les plus attachantes de notre siècle.

Mon vœu se réalisera-t-il ? Je n’en désespère pas. Un jour, au Bois de Boulogne, dans une promenade où je lui parlais de lui, de sa réputation, il s’arrêta tout à coup, me prit le main et me dit : « Savez-vous quelle serait mon ambition ? C’est qu’il restât cent vers de moi. » Il en restera davantage.

Béranger a été mis au premier rang par les plus grands hommes de son époque. Gœthe, dans ses conversations avec Eckermann, revient souvent à Béranger, et n’hésite pas à l’appeler un Poète de génie.

Chateaubriand, dans la préface de ses Études historiques, a écrit textuellement : « Sous le simple titre de chansonnier, un homme est devenu un des plus grands poètes que la France ait produits. Avec un génie qui tient de La Fontaine et d’Horace, il a chanté, quand il l’a voulu, comme Tacite écrivait. »