Page:Legouvé - Dernier travail, derniers souvenirs, 1898.djvu/61

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Les a-t-on vu mutins ? Les a-t-on vu rebelles ?
Nos princes ont-ils eu des soldats plus fidèles ?
Furieux dans la guerre, ils souffrent nos bourreaux ;
Et, lions au combat, ils meurent en agneaux.
J’ai trop de pitié d’eux pour ne pas les défendre.


Les ! les ! Voilà le mot décisif : c’est le cri du néophyte. Il ne s’agit plus pour lui de défendre Polyeucte, mais tous les chrétiens. La cause du christianisme devient la sienne ! Il est conquis à la foi comme les autres ! Il a trouvé son chemin de Damas ! Il subit le coup de cette folie de la croix, dont Corneille est à la fois le poète et l’historien. Polyeucte a été entraîne par Néarque, Pauline par Polyeucte, Sévère par Pauline, comme Félix sera entraîné à son tour.

Cette conversion de Félix a été l’objet de vives critiques. Elle compte, pour moi, parmi les plus grandes beautés de la pièce. Jeter au bas d’un drame, peuplé de créatures idéales, Félix, c’est-à-dire l’assemblage de toutes les couardises, de toutes les vanités, de toutes les petitesses mondaines… Puis, tout à coup, nous le montrer arraché de la terre, soulevé au-dessus de la terre, n’est-ce pas peindre d’un seul trait, dans toute sa puissance, cette miraculeuse vertu qui transporte les montagnes.