Page:Legouvé - Soixante ans de souvenirs, 1886.djvu/101

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mais une fable intéressante, et, sous cette fable, une ingénieuse leçon de morale. Un libraire voulut absolument publier le livre. Succès immense. Le premier volume en appelle un second : même effet. Après les Contes à ma fille, viennent les Conseils à ma fille ; après les Jeunes filles, les Jeunes femmes ; après les Jeunes femmes, les Jeunes mères ; puis les Mères de famille ; puis les Encouragements de la Jeunesse, son meilleur ouvrage, dédié aux jeunes gens. Une nouvelle carrière s’était ouverte devant lui. Le père avait fait une seconde popularité à l’auteur dramatique. On l’appelait non seulement, comme Berquin, l’ami des enfants, mais l’ami des familles. Enfin, telle était sa réputation qu’elle le conduisit… jusqu’aux Tuileries ! La duchesse de Berry, vive, prime-sautière, et qui rêvait toujours de réconcilier la monarchie avec la société nouvelle, eut l’idée de demander au conteur à la mode, des récits pour ses enfants. Voilà donc l’élève de Mirabeau, le vieux libéral, introduit au pavillon Marsan, mêlé familièrement aux jeux et aux études des deux enfants, devenu une sorte de précepteur amateur pour la petite fille qui devait être la duchesse de Parme, et pour le petit garçon qui devait s’appeler le comte de Chambord. A en juger par les résultats, l’élève ne profita pas beaucoup des leçons ; mais heureusement elles ne furent pas perdues pour le maître. D’abord, il y garda toute son indépendance ; puis les Contes aux Enfants de France eurent un succès considérable… tous les courtisans les achetèrent : c’est ainsi que M. Bouilly tripla la dot de sa fille avec les Contes à ma fille.