Page:Legouvé - Soixante ans de souvenirs, 1886.djvu/705

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instruments de croyance. C’est l’étude approfondie de la constitution des astres et de leur mouvement dans l’espace qui le conduisit à les assimiler à la terre, à y retrouver les mêmes éléments et à leur donner la même destination. L’immortalité de l’âme, telle que la conçoit Reynaud, est donc une immortalité active, militante. Tout homme est un lutteur éternel ! Toute vie se compose d’une suite de vies qui ne sont qu’une suite de combats. Chacun de nous passe éternellement de monde en monde, travaillant, tombant, se relevant, se rachetant, jusqu’au jour où il entre dans la voie du perfectionnement continu et infini, sous les yeux d’un créateur éternel, qui, lui aussi, reste toujours son guide, son consolateur et son juge. Eh ! bien, voilà Terre et Ciel, ou plutôt voilà Jean Reynaud. ― C’est assez ! me dit Chapu, je comprends. Lancer la figure en plein ciel, la montrer s’emparant de l’infini et la rattacher, ne fût-ce que par le bout du pied, à la terre ! » Ainsi fit-il, et il fit un chef d’œuvre, qu’on peut voir et admirer au cimetière du Père-Lachaise.

Quand au passage de Reynaud au pouvoir et aux affaires, il ne fut que de quelques mois. Comment, avec son admirable talent de parole et son naturel don d’autorité, n’a-t-il pas joué un grand rôle politique ? Le temps lui a manqué. La Providence avait sans doute plus besoin de ses services comme penseur que comme homme public. Mais je ne veux pas quitter cette trop courte période de sa vie sans citer un trait où éclatent son courage et son invention dans le dévouement.

Il était représentant pendant les journées de Juin. Je