Page:Leibniz - La Monadologie, éd. Bertrand, 1886.djvu/17

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mur, sed usu vel dubio, vel repugnante, origini potius hæreamus. — Philosophi plebeiis non semper in eo præstant, quod alias res sentiant, sed quod sentiant alio modo, id est oculo mentis, et cum reflexione et attentione, et rerum cum aliis comparatione. — Termini technici cane pejus et angue fugiendi sunt… porro terminis technicis, ut dixi, plane carendum, ab iisque cavendum est, quoad ejus fieri potest, fieri autem semper non potest, prolixitatis causa, quæ oritura esset, si utendum esset semper vocabulis popularibus[1]. On nous saura gré de mettre ces textes sous les yeux du lecteur : ils constituent une excellente rhétorique de la dissertation philosophique. Avouons pourtant qu’il est bon de se rappeler le précepte : « Faites ce qu’il vous dit et non pas ce qu’il fait. » Par exemple, il est certain que Leibniz ne s’est pas privé d’employer un fort grand nombre de mots techniques, et qu’il a mérité parfois le reproche qu’il adresse aux scolastiques d’abuser des métaphores, reproche aussi vrai qu’inattendu ; car, qu’est-ce qui caractérise le style pourtant si sec des scolastiques, sinon qu’il réalise constamment des abstractions, et, sous des mots abstraits et barbares, dissimule de perpétuelles métaphores ? Quod quis miretur, dit Leibniz, eorum oratio tropis scatet, et il donne comme exemples de ce défaut, l’hæccéité, l’animalité, etc., ou bien encore la définition de la cause, par Suarez : Quod influit esse in aliud.

Achevons rapidement le récit du séjour de Leibniz à Francfort : il y écrivit sa Theoria motus abstracti, qu’il dédia à notre Académie des sciences, et sa Theoria motus concreti, qu’il dédia à la Société royale de Londres. On sait qu’il y établit contre Descartes, que ce qui est constant dans le monde des corps, malgré les chocs innombrables et les perpétuelles redistributions de mouvements, c’est la quantité de force (principe de la permanence de la force ou de la conservation de l’énergie) mesurée par le produit de la masse par le carré de la vitesse, et non la quantité de mouvement, comme le soutenaient les cartésiens (mv² et non mv). Il faut aussi placer à la même époque (1671), une série de lettres à Arnaud qui prouvent que Leibniz arrêtait sa théorie de la substance en même temps que sa théorie du mouvement. C’est à propos de la question de la transsubstantiation qu’il combat la doctrine cartésienne de la substance incompatible, selon lui, et avec le dogme catholique de la transsubstantiation, et avec le dogme luthérien de la présence

  1. Erdmann, de Stylo phil. Niz., passim.