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Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/206

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la marée d’équinoxe qui envahit le camp des Francs et en chasse les Romains :

 Les bœufs épouvantés nagent avec les chariots qu’ils
 entraînent ; ils ne laissent voir au-dessus des vagues que leurs
 cornes recourbées et ressemblent à une multitude de fleuves
 qui auraient apporté eux-mêmes leurs tributs à l’Océan…
 Mérovée s’était fait une nacelle d’un large bouclier d’osier :
 porté sur cette conque guerrière, il nous poursuivait escorté
 de ses pairs qui bondissaient autour de lui comme des tritons.

C’est magnifique : mais voyez comment, jusque dans ses tableaux du Nord, le Breton Chateaubriand est poursuivi des lumineux souvenirs de la mythologie grecque.

Il y a donc le combat des Francs. Et il y a Velléda.

L’histoire de Velléda est rapide, éclatante, étrange et triste. Je vous en rappelle brièvement la donnée. Eudore, nommé commandant des contrées armoricaines, est averti d’un complot tramé contre les Romains par les prêtres gaulois et par la prophétesse Velléda. Il les épie, assiste à la scène du complot dans la forêt, exige que Velléda et son père Ségenax lui soient livrés comme otages. Or, la belle captive aime son maître, qui finit par céder à ce hardi et frémissant amour. « Je tombe, dit Eudore, aux pieds de Velléda… L’enfer donne le signal de cet hymen funeste ; les esprits des ténèbres hurlent dans l’abîme, les chastes épouses des patriarches