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Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/186

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sent la générosité et l’abnégation jusqu’à se vouloir détruire eux-mêmes ? Non ; mais, n’ayant plus de foi, ils ne savent pas. Ce sont des snobs, et qu’on a revus. Ils se piquent de liberté et de hardiesse d’esprit. Ils croient d’ailleurs n’applaudir qu’à des phrases amusantes, qui les brusquent agréablement. Ils ne savent pas que dans une trentaine d’années les plus grossières de ces phrases, après avoir pénétré dans les cerveaux des avocats, des procureurs, des professeurs, des hommes de lettres, descendront dans des têtes plus obscures et se traduiront par des actes aveugles.

L’excellent, le vertueux M. de Malesherbes, qui s’est donné tant de peine pour faire imprimer la Julie et l’Émile, sera envoyé à l’échafaud par des scélérats ivres de Jean-Jacques.

En 1760, Amélie de Boufflers, petite-fille de la maréchale, future duchesse de Lauzun, avait onze ans. « Elle avait une figure, une douceur, une timidité virginale… » Un jour Rousseau la rencontra seule dans l’escalier du petit château… Faute de savoir que lui dire, il lui proposa un baiser que, dans l’innocence de son cœur, elle ne refusa pas. — Trente-trois ans après, la duchesse de Lauzun, la plus pure et la plus douce parmi les femmes connues du XVIIIe siècle, était condamnée à mort par des hommes qui étaient de fervents adorateurs de Rousseau.

Si l’on se remémore rapidement l’enchaînement mystérieux et fatal des effets et des caus