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Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/22

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Par exemple, tout ce qu’on répétait à la maîtrise, tout ce qu’on chantait au chœur, tout ce qu’on y faisait, le bel et noble habit des chanoines, les chasubles des prêtres, les mitres des chantres, la figure des musiciens, un vieux charpentier boiteux qui jouait de la contrebasse, un petit abbé blondin qui jouait du violon, le lambeau de soutane qu’après avoir posé son épée, M. le Maître endossait par-dessus son habit laïque, et le beau surplis fin dont il en couvrait les loques pour aller au chœur ; l’orgueil avec lequel j’allais, tenant une petite flûte à bec, m’établir dans la tribune pour un petit bout de récit que M. le Maître avait fait exprès pour moi ; le bon dîner qui nous attendait ensuite ; le bon appétit qu’on y portait ; ce concours d’objets vivement retracé m’a cent fois charmé dans ma mémoire, autant et plus que dans la réalité. J’ai gardé toujours une affection tendre pour un certain air du Conditor alme siderum qui marche par ïambes, parce qu’un dimanche de l’Avent j’entendis de mon lit chanter cet hymne avant le jour sur le perron de la cathédrale, selon un rite de cette église-là… etc. (Livre III).

Mais je ne puis vous lire ainsi toutes les Confessions et je le regrette. Je ne puis que les analyser ; et combien de détails charmants, étranges, émouvants ou irritants je laisserai de côté ! — Pour plus de clarté, et pour fixer vos propres souvenirs, il me paraît indispensable de faire un sommaire très bref des faits principaux relatés dans ces six premiers livres qui nous occuperont aujourd’hui.

LIVRE I. — Jean-Jacques naît à Genève le 28 juin 1712, d’un horloger. Sa mère meurt en le