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Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/232

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l’éducation de tous les enfants. » On ne peut pas le dire, puisque ce système implique, — essentiellement et pour commencer, — l’isolement et la richesse. — C’est donc un rêve pur. Mais quel rêve ? Celui d’une éducation plus qu’aristocratique. De telles conditions y sont requises qu’il n’y aurait, dans tout le royaume de France, que quelques centaines d’enfants qui pussent recevoir une éducation de cette sorte. Applicable seulement à une si petite minorité, cette éducation, si elle réussit, donnera une espèce de « surhommes », — de surhommes sensibles et pleurards selon la conception de Rousseau, mais guéris du mensonge social et fidèles à la nature, — et dont le petit groupe, produisant d’autres surhommes, arrivera peut-être lentement à réformer la société elle-même. — Est-ce là la pensée de Rousseau ? Je ne sais pas. Lui non plus. Même, on s’aperçoit dans la suite que ces conditions posées avec tant de rigueur et de solennité (isolement complet, gouverneur volontaire et perpétuel), ne sont pas indispensables aux parties les plus sensées de son plan. Mais quoi ! Il rêve, et cela l’amuse.

Donc, l’enfant ainsi isolé, il s’agit de laisser la nature agir sur lui, et seulement d’en protéger le développement contre les influences funestes.

Mais la nature, qu’est cela ? — Nous l’avons souvent demandé à Rousseau. Cette fois enfin il nous répond ; et c’est, je crois, la seule fois dans toute son œuvre.