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Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/294

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immédiats que ce qu’on appelle aujourd’hui l’esprit philosophique, l’est beaucoup moins dans ses conséquences. D’ailleurs il est aisé d’étaler de belles maximes dans les livres : mais la question est de savoir si elles tiennent bien à la doctrine… Reste à savoir encore si la philosophie, à son aise et sur le trône, commanderait bien à la gloriole, à l’intérêt, à l’ambition, aux petites passions de l’homme, et si elle pratiquerait cette humanité si douce qu’elle nous vante la plume à la main.

Par les principes, la philosophie ne peut faire aucun bien que la religion ne fasse encore mieux, et la religion en fait beaucoup que la philosophie ne saurait faire…

Nos gouvernements modernes doivent incontestablement au christianisme leur plus solide autorité et leurs révolutions moins fréquentes ; il les a rendus eux-mêmes moins sanguinaires ; cela se prouve par les faits en les comparant aux gouvernements anciens.

C’est bien Rousseau, ce n’est pas Joseph de Maistre, qui a écrit cela. Toutes ces phrases durent faire hurler les Encyclopédistes. Rousseau, dès lors, ne fut plus lui-même à leurs yeux qu’un dangereux fanatique.

Rousseau, cependant, n’avait pas changé sur ce point. Déjà, vers 1755, je crois, à un souper chez mademoiselle Quinault raconté par madame d’Épinay qui y assistait, Jean-Jacques, indigné par l’impiété des propos, s’écriait :

Si c’est une lâcheté de souffrir qu’on dise du mal de son ami absent, c’est un crime que de souffrir qu’on dise du mal de son Dieu, qui est présent ; et moi, messieurs, je crois en Dieu… Je sors si vous dites un mot