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Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/306

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terre. Puis, monte peu à peu sa plainte d’opprimé ; puis sa colère éclate. C’est vraiment très bien fait. Et voici quelques lignes de la fin :

Que vous discourez à votre aise, vous autres hommes constitués en dignité !… Vous accablez fièrement le faible, sans répondre de vos iniquités à personne… Sur les moindres convenances d’intérêt ou d’état, vous nous balayez devant vous comme la poussière. Les uns décrètent et brûlent, les autres diffament ou déshonorent, sans droit, sans raison, sans mépris, même sans colère, uniquement parce que cela les arrange, et que l’infortuné se trouve sur leur chemin.

Monseigneur, vous m’avez insulté publiquement (n’est-ce pas que cela a le ton et l’allure de quelque couplet d’un drame de Hugo où un plébéien riverait son clou à un prince ?). Monseigneur vous m’avez insulté publiquement ; je viens de prouver que vous m’avez calomnié. Si vous étiez un particulier comme moi, que je pusse vous citer devant un tribunal équitable, et que nous y comparussions tous deux, moi avec mon livre, et vous avec votre mandement, vous y seriez certainement déclaré coupable et condamné à me faire une réparation aussi publique que l’offense l’a été. Mais vous tenez un rang où l’on est dispensé d’être juste, et je ne suis rien. Cependant vous qui professez l’Évangile, vous prélat fait pour apprendre aux autres leur devoir, vous savez le vôtre en pareil cas. Pour moi, j’ai fait le mien, je n’ai plus rien à vous dire, et je me tais.

Daignez, monseigneur, agréer mon profond respect (Motiers 18 novembre 1762).

J’ai dit que, dans le fond, la Lettre à M. de Beaumont n’offrait rien que de déjà vu. J’en excepte une page intéressante. Dans le moment même où il