Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Qui décrira, qui sentira les charmes de ces repas composés, pour tous mets, d’un quartier de gros pain, de quelques cerises, d’un petit morceau de fromage, et d’un demi-setier de vin que nous buvions à nous deux ! Amitié, confiance, intimité, douceur d’âme, que vos assaisonnements sont délicieux ! Quelquefois nous restions là jusqu’à minuit sans y songer et sans nous douter de l’heure, si la vieille maman ne nous en eût avertis.

(Ah ! que vient faire cette vieille ?…) C’est égal, cette simplicité de goûts, très sincère chez Jean-Jacques, est un de ses charmes, et que rien ne pourra lui enlever.

Cependant, à travers des découragements et des paresses, il cherche à se faire sa place, soit dans la musique, soit dans la littérature, et particulièrement au théâtre ; et c’est à cela qu’il songe entre 1741 et 1749.

Plus tard, il répétera à satiété que son cas est unique, qu’il n’a jamais pensé à la gloire, qu’il n’a pris la plume que vers quarante ans, et pour son malheur. Cela n’est pas vrai. — De bonne heure il a eu la passion et le don de la musique, et il a rêvé d’être compositeur. De bonne heure aussi, et malgré des études fort capricieuses et incomplètes, il a écrivaillé en prose et en vers, et il a rêvé d’être poète, et surtout auteur dramatique.

A son arrivée à Paris, il avait en portefeuille non seulement Narcisse, petite comédie en prose dans le goût de Marivaux écrite à vingt ans, mais des poésies, des élégies, des vers amoureux, et une tra-